28 Février 2018
La France de Clemenceau se relève de la crise de 1917 au prix d’une dictature de salut public.
Au pouvoir depuis novembre 1917, Clemenceau (1841-1929)[1] triomphe d’une crise parlementaire majeure qui lui a permis de se débarrasser de ses concurrents. Ainsi disparaissent de la scène politique Painlevé[2], Briand, Viviani, Doumer. Seul le président de la République R. Poincaré maintient un certain équilibre constitutionnel. Plusieurs hommes politiques accusés de défaitistes et de pacifistes sont rejetés voir mis en état d’arrestation. Les cas de Malvy et de Joseph Caillaux[3] sont significatifs. Ce dernier est arrêté le 14 juillet 1918 et sera jugé en … février 1920.
On assiste à une véritable réorganisation économique du pays. Le 15 février, le président du Conseil obtient le droit de légiférer par décret. Ce qui permet d’accélérer les prises de décision. Il résout le dilemme « beurre ou canon » en donnant clairement la priorité aux industries de guerre. Il impose à la population les jours sans viande et l’interdiction des pâtisseries et des biscuiteries.
Il bénéficie également de l’aide américaine. De fait la France ne peut plus engager d’emprunt sans risquer la catastrophe. La dette est déjà abyssale. En 1917, on compte environ 800 millions de dollars dont 400 millions de découvert à la banque de New York. La France plafonne à 3252 millions de Francs. Dès avril 1917, le Trésor Fédéral américain consent un prêt immédiat de 3 milliards de dollars au pays de l’entente et 2 à échéance. Les prêts sont assortis d’engagement à acheter aux Etats-Unis, mais aussi à soutenir le Franc qui risquait l’effondrement. Les Etats-Unis apportent également une aide alimentaire.
Archives départementales de l’Aube. 17 R 4.
Couverture d’un recueil sur les aides alimentaires américaines.
Sur la gestion économique de la guerre, les Etats-Unis montrent également l’exemple. Le Président Wilson obtient le droit de réquisition et impose le système de l’acheteur unique. Ainsi le 10 février 1918, le gouvernement français, sous l’impulsion du ministre du commerce Clémentel, obtient la possibilité de : « réglementer ou suspendre, en vue d’assurer le ravitaillement national, la production, la circulation, la vente, la mise en vente, la détention ou la consommation des denrées servant à l’alimentation de l’homme et des animaux ». L’Etat devient l’incitateur de la vie économique.
L’armée se réorganise aussi sous l’impulsion du Chef de cabinet militaire de Clemenceau, le général Mordacq[4] (surnommé l’Ours). Georges Clemenceau va le chercher au PC de la 24ème DI à Romigny le 2 novembre 1917. Cependant, après la crise de 1917, on admet, avec Pétain, l’impossibilité de rompre et d’exploiter. Il est vrai que le souci des effectifs n’autorise que des offensives tactiques à but limité. C’est la tactique des « Feux follets d’offensives » avec utilisation maximale du matériel. Dès que l’ennemi réagit, on arrête. On impose également la défense en profondeur ou l’on met le moins d’homme possible en 1ère ligne quitte à compenser par le matériel.
Pétain est désignée à la tête de l'armée française le 29 avril 1917 comme chef d'état-major général et ne devient général en chef que le 10 mai 1917. Très vite, il prend des mesures visant à améliorer le quotidien des soldats : permissions plus régulières, meilleurs approvisionnements, meilleure alimentation des troupes, arrêt des offensives coûteuses. Il limite la répression qui avait suivi les mutineries du printemps. Il visite les cantonnements, les régiments et s'entretient avec les cadres subalternes comme avec les hommes de troupe.
Sur le plan militaire, il pose les fondements d'une nouvelle doctrine. Les moyens doivent être aux missions. L''artillerie et les nouvelles armes (chars, avions, etc.) doivent être privilégiées. L'objectif premier est d'économiser les vies des fantassins. Sur le plan stratégique, Pétain prône la prudence. Il résume sa position par la célèbre formule : "J'attends les chars et les Américains".
[1] Pour plus d’informations voir http://www.herodote.net/histoire/synthese.php?ID=205.
[2] Voir au sujet Anne-Laure Anizan, Paul Painlevé, Paul Painlevé, un scientifique en politique, disponible sur http://ecoledoctorale.sciences-po.fr/theses/theses_en_ligne/anizan_hist_2006/anizan_hist_2006.pdf. (consulté le 5 juin 2008).
[3] Voir Science Po. Centre d’Histoire. Notice biographique. Disponible sur http://centre-histoire.sciences-po.fr/archives/fonds/roche_caillaux.htmlr . (consulté le 5 juin 2008).
[4] Jean Jule Henri Mordacq (1868-1943). Voir http://www.military-photos.com/mordacq.htm